« Quel bonheur d’être à terre ! Six jours en convoyage, c’est très long quand ce n’est pas une croisière, explique Gwénolé, hier soir au moment de son arrivée. Je ne suis pas si fatigué que ça car le rythme était moins soutenu qu’en course. La dernière nuit j’ai dû dormir 8 heures dont 3 heures d’affilée ce qui n’arrive absolument jamais sur un Figaro Bénéteau ! Je vais donc commencer par aller partager un bon restaurant et boire un verre avec les copains.»
Quand Gwénolé joue les « escortes » !
Après la neutralisation de l’étape lundi soir, les concurrents de la Lorient Horta Solo ont rejoint les Açores en convoyage. Mais un nouveau rebondissement est venu troubler la lente progression de la flotte quand, dans la nuit de vendredi à samedi, Gildas Mahé (Interface Concept) a heurté un OFNI et cassé son safran. Sept concurrents, dont Gwénolé, se sont alors spontanément déroutés pour assurer la sécurité du marin en difficulté. « Je ne faisais pas partie des bateaux les plus proches de Gildas mais j’ai décidé d’y aller. Il avait perdu un safran et surtout il avait une voie d’eau, on craignait donc que le bateau coule. Fred Rivet (DFDS Seaways) avait des cartouches de Sikaflex* à bord. Il les lui a fait passer dans un bidon que Gildas a récupéré avec sa gaffe**. Il a ainsi réussi à colmater sa fuite. Pendant ce temps, nous faisions des ronds dans l’eau autour de lui car les conditions de navigation étaient très soutenues. Après concertation, on s’est dit que cela ne servait à rien que tout le monde reste. Je suis finalement resté avec Damien Guillou (Solidarité Mutualiste) et Corentin Horeau (Bretagne Crédit Mutuel Performance) pour accompagner Gildas jusqu’à Horta, à six nœuds de moyenne, tandis que les autres bateaux ont poursuivi leur route. » Une fois de plus, cet incident montre combien la solidarité entre marins n’est pas une légende… En professionnels, ils ont su réagir avec recul et intelligence pendant ces heures difficiles.
« Le bateau se couchait dans les vagues »
Grâce à l’annulation de l’étape, les concurrents de la Lorient Horta Solo ont évité le pire de la dépression mais, comme prévu, ils ont néanmoins dû faire face à des conditions de navigation difficiles dès jeudi soir. « Nous avons tous été très prudents ! Le plus compliqué à gérer, étaient les vagues de cinq mètres qui parfois couchaient le bateau. Mais je me suis toujours senti en sécurité car j’étais bien attaché et je passais beaucoup de temps à l’intérieur du Figaro. En revanche quand j’étais à proximité de Gildas, je restais à l’extérieur pour le surveiller et je prenais de sacrées vagues dans la figure ! C’est bizarre, car quand tu es en mode course, tu y vas, ça mouille, c’est froid, et tu ne te poses pas de questions, tandis que là, sans l’adrénaline, j’ai eu l’impression de subir beaucoup plus les éléments… » Confie le skipper de Safran-Guy Cotten
Une opportunité pour valider et optimiser son nouveau matériel.
Si les marins ont parfois trouvé le temps long pendant ces six jours de convoyage – les deux premiers jours s’étant déroulés en course – c’était la première fois que Gwénolé naviguait en solitaire aussi longtemps dans ces conditions extrêmes. Le jeune architecte naval a ainsi profité de cette occasion pour optimiser son bateau afin de préparer ses prochaines courses. « C’est un exercice que l’on fait rarement car la saison est très dense. J’ai découvert plein de choses sur lesquelles je ne m’attardais pas en course par manque de temps ou simplement à cause de la fatigue. J’ai ainsi eu l’opportunité de valider le deuxième pilote automatique ou encore le nouveau siège de barre, tous deux installés juste avant le départ de la course. J’ai pris des notes et trouvé de nombreuses améliorations à apporter. Ce sont des petits détails qui seront très importants pour la transat en solitaire en début d’année prochaine***. Aussi, entre coureurs, nous avons beaucoup échangé à la VHF et c’était très sympa de trouver ensemble des solutions à apporter à nos soucis informatiques et bien d’autres problèmes de ‘figaristes’ » conclut Gwénolé.
Maintenant que toute la flotte a rejoint le port d’Horta, il va falloir dès aujourd’hui penser à l’étape retour. Tandis que les préparateurs vont faire un tour complet des bateaux, les skippers vont de nouveau passer en mode « course » et analyser la météo de cette étape de 1 150 milles vers Lorient qui s’élancera des Açores dès vendredi.
* Mastic étanche qui permet de colmater un trou ou de faire un joint.
** Une gaffe est une longue tige en bois avec un crochet recourbé vers l’intérieur sur l’une des extrémités. En bateau, elle sert à récupérer des choses tombées à la mer ou bien à s’amarrer à une bouée par exemple.
*** La Transat Bretagne Martinique, s’élancera de Brest au Printemps 2015 vers Fort de France en Martinique.
Source : Mille & une vagues